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Le droit à la communication : les femmes dans la société de l’information

Publié le mardi 27 septembre 2011

Dans le cadre de la campagne, les membres du Communication Rights in the Information Society (CRIS) ont rédigé une série d’articles pour le United Nations Research Institute for Social Development (UNRISD), Institut de recherche des Nations Unies pour le Développement Social, destinés à alimenter le SMSI. Le document qui suit est un résumé d’un de ces articles, signé Dafne Plou.

L’inexistence de voix et de perspectives féminines dans la société de l’information indique que les " nouvelles " technologies d’information et de communication (TIC) reflètent bon nombre des schémas de répartition des sexes (par rapport au pouvoir, aux valeurs et à l’exclusion) qui ont prévalu pendant des dizaines d’années au sein des " anciens " médias. Il est clair que ces schémas ne peuvent être dissociés des relations entre les sexes dans la société au sens large.

Aucun média, qu’il soit " ancien " ou " nouveau ", ne peut à lui seul résoudre le problème de l’inégalité des sexes. La structure des médias révèle des relations sociales, économiques et politiques beaucoup plus larges dans lesquelles les femmes ont tendance à être marginalisées. Le rôle des " nouveaux " médias, de même que celui des " anciens ", consiste essentiellement à véhiculer la transmission d’idées, d’images et d’informations. Le problème auquel les femmes sont confrontées est alors de savoir qui prend les décisions concernant l’accès, le contenu et le contrôle. De par leur nature, la plupart des débats sur les " nouveaux " médias restent identiques à ce qu’ils ont toujours été dans la mesure où ils sont associés aux questions de pouvoir.

L’histoire d’un cybercentre installé dans un quartier défavorisé illustre parfaitement ces problèmes. Les parents habitant dans cette communauté ne voulaient pas que leurs enfants, en particulier les filles, aillent au cybercentre. Ce dernier était en effet considéré comme un " repère de voyous " en raison de son programme destiné aux jeunes ayant quitté le cursus scolaire. Les filles représentaient moins de 2 % des utilisateurs. Plutôt que d’utiliser elles-mêmes les ordinateurs, elles s’asseyaient à côté des garçons et les regardaient surfer sur Internet, jouer à des jeux et travailler sur l’ordinateur. L’ensemble du personnel formateur, des responsables et de l’équipe de soutien technique était constitué d’hommes. Deux femmes seulement s’occupaient du support logistique et administratif.

L’initiative de ce cybercentre représentait un échec évident face aux besoins de la communauté, et notamment des jeunes. Afin d’y remédier, de nouveaux programmes et services pour les filles et les jeunes femmes sont actuellement en cours d’élaboration afin de favoriser leur participation au cybercentre et d’encourager son utilisation. Si l’on élargit la perspective, cet exemple soulève la question suivante : que peuvent faire les responsables pour combler le fossé entre les hommes et les femmes au sein des TIC ?

Un des principaux problèmes est celui de l’image des femmes sur Internet qui, trop souvent, renforce les stéréotypes et les préjugés qui contribuent à définir leur rôle en tant qu’acteurs sociaux et leur capacité à intervenir dans la vie publique et à l’influencer. Bien qu’il existe des milliers de pages Web consacrées à des organisations de femmes ou à des médias alternatifs qui favorisent les débats sur les spécificités entre les sexes, les nouvelles agences utilisant Internet gardent les mêmes politiques de parti pris contre les femmes, en ligne comme sur support écrit. La technologie a évolué, mais les données de base restent inchangées. En privilégiant certaines questions, laissant les autres de côté, et en donnant la parole à un groupe particulier d’acteurs sociaux ou en lui conférant une certaine image, ignorant les autres, les médias ont répandu une image du monde dans laquelle les femmes ne sont guère représentées.

La participation des femmes dans tous les domaines de la vie sociale a toujours été sous-évaluée. Même dans les cas où les femmes ont contribué de façon significative au développement économique, social, politique et culturel, leur engagement ne correspond nullement à une augmentation de leur représentation et participation au niveau du processus décisionnel. Cet état des choses est dû, en partie, au fait que le droit des femmes à la communication est actuellement entravé.

Les mouvements de femmes à travers le monde ont déclaré maintes fois être en faveur d’un système de communication basé, à l’échelle nationale et internationale, sur des principes démocratiques limitant les monopoles d’entreprises dans la mondialisation des télécommunications. Les femmes se sont également impliquées dans la création de sociétés d’information et de communication où le développement est axé sur les besoins humains fondamentaux et des objectifs sociaux, culturels, économiques et environnementaux bien définis, et où la priorité est donnée à la lutte contre la pauvreté et autres inégalités de manière viable pour l’environnement. Ces femmes se sont engagées à entreprendre une démarche spécifique à leur groupe pour s’attaquer à tous les problèmes, y compris au niveau de l’information et de la communication.

Malgré cela, les femmes restent sous-représentées dans l’ensemble des structures décisionnelles des TIC et la politique de ces dernières repose toujours sur l’idée que les technologies d’information et de communication ne font pas intervenir les questions de sexe - les femmes doivent s’adapter aux technologies plutôt que revendiquer une politique des TIC qui soit formulée de façon à satisfaire leurs besoins et intérêts particuliers. Après trente années de recherches, de théories et d’analyses féministes, les femmes sont plus à même d’affronter les problèmes que les TIC mettent en avant. Au même moment, les gouvernements et la société civile commencent à prendre en compte certaines revendications des mouvements de femmes au lieu de les rejeter ou de les ignorer, comme ils avaient l’habitude de le faire vingt ans auparavant.

Pour les femmes, parvenir à un contrôle relatif au niveau des TIC et de la communication est vital afin de s’assurer que les ressources et les bénéfices de la société de l’information et de la communication soient répartis de manière égale entre les hommes et les femmes. A cette fin, le mouvement des femmes a développé un nombre incroyable d’initiatives dans les FTIC en réseau pour la défense et la promotion des droits des femmes aux niveaux local, régional et international. Il s’agit d’une forme de participation collective qui sert également à donner le pouvoir aux femmes afin qu’elles prennent le contrôle de leur propre existence et de celle de leur communauté.

Article de Dafne Plou, journaliste et consultante en Argentine. Ce texte a été initialement publié par la WACC dans sa revue Media and Gender Monitor (http://www.wacc.org.uk/publications...). Traduit de l’anglais par Valérie Cazaux.

CRIS - Communication Rights in the Information Society Derechos de Comunicacion en la Sociedad de la Informacion http://www.crisinfo.org/ act@crisinfo.org

Avril 2003

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